UNBORN LIVING

44 jours que l’Emprise durait. Je tournai et retournai mon corps de tous les côtés, pour voir celui à l’angle duquel je souffrirais moins. Mais les digues cérébrales cédaient de toutes parts, – & me voici dans le bain igné de l’Infini.
Il me fallait dormir, pleurer, hurler… Mais, à son tour, la masse elle-même tourna. Prenant conscience des possibilités, mes pensées s’effilochèrent dans un procès hyper-projectif. Je ne cessai de me cogner dans ma conscience. Avale cette conscience, me dis-je, lave-la de cette atroce Substance qui est sur le point de te tuer. Je vissai, lors, le Tonal, & le branchai sur un fond qui jamais ne varia.

Les parois de l’estomac-conscience… Une chute vertigineuse en moi-même, dans la plus neutre,
diz-je,
partie de moi-même…
Avec, comme jadis, naguère, et avant encore, la tête complètement vide, & ces vibrations.

L’Emprise durait depuis 44 jours, & je retrouvai cette remise en cause dès le matin : que fais-tu? Où es-tu qui? es-tu. & comme ça jusqu’au soir où, anéanti, je pouvais encore dormir. Oui, mais pour combien de temps?…
Ces questions, éjaculations mentales, fleurs maladives, limbes de la Pensée… Dans cet instant pétrifié, ahuri et stupéfait. Me dresser encore pour aboyer; à l’Horizon de l’Horizon – . Je retrouvai aussi ce vieil Ennui, ces brusques chutes du niveau du moi, et plongeai vaguement dans l’


Impossible . Oui, ces longs après-midi blancs comme une vieille Psychose, blanc comme une absence qui brille. Descendant dans mon esprit, je en sus que faire lorsque, soudain, je rencontrai comme un cristal mental, de la vraie vieille roche pensante des St jours de jadis. Ce blanc, cette concrétion spirituelle, je l’avais déjà connu du temps que j’étais moi-même.
Aussi est-ce que je tournai encore. Au seuil de l’Ineffable, je prisai encore le fait d’être au monde, de me sentir temporairement et marginalement en vie.

Étais-ce cela, aussi simple que ça puisse paraître, que d’être en vie? C’est alors que le plan se déplia, & que tout se mit à se passer sur deux niveaux. Mais quelque soit le degré où je me tienne, c’était l’Horreur.

44 jours de cette terrible Emprise, oui, & je commençai de craquer. Comment traduire cette douleur, comment mettre des mots sur le Manque de Substance? Mon corps se nécrosait, se désarticulait lentement; l’espace se mit à faire du bruit à la vitesse de Dieu lui-même. Au bord de la catatonie, dans ma chambre, il y avait des étoiles pensantes sur tous les plans. Mon corps, traversé de secousses & de spasmes, pantelant et mort…

Saisis ta Volonté. Tu ne t’aides pas toi-même à te plaindre sans arrêt. Mais les souffrances sont Haffreuses, mais l’immobilité, mais le vide,… mais… mais…Rien du tout! Branche-toi sur un autre truc, avale des rouges,
etc.

Silence mortel du soleil matinal, nuit du corps humain… Il y a sûrement quelque-chose dedans,
mais c’est beaucoup trop loin
& hypothétique de…
m’atteindre.

Ennui ( manque )

Impression d’un resserrement de tout mon être. L’espace lui-même est vaste, mais d’une vastitude tendue & bruyante, un peu comme si l’horizon me tombait sur la gueule. Impossible de lire, d’écrire…
Je me suis de toujours trouvé dans ce genre de situation; d’impasses. Dimanche fragmenté. Mais il y a un dimanche éternel, une stase sempiternelle à laquelle rien, en fait, – ne m’accoutumera. Il s’agit de ces moments concrets de brusques pertes du Réel, & de flottements en-deçà de la Réalité, en-deçà de moi-même.
& je ne sais que trop cette cruelle infériorité, je ne connais que trop l’Ennui. Je pourrais écrire un poème, mais ce ne serait rien. Un roman?, n’y pensez même pas.
Subir la seule justice, – la sanction du Temps.
L’Ennui est dans cette catastrophe, oui, dans cet abîme au jour le jour, ce gouffre, dans ce crucifiement ralenti dont personne ne peut envisager l’intense souffrance. Non seulement le Temps ne passe pas, mais, en sus, je suis complètement vide, vide de substance &, à ce stade, vierge d’identité.
Il se fait en effet jour une certaine précarité au plan strictement psychique, & je vois venir avec horreur le moment où, à force de ne rien faire, je vais être emporté, – fragmenté. Je ne songe même plus à me concentrer, mon esprit baignant par trop dan l’Infini pour cela. J’ai le pli de l’Illimité; mon cerveau ne participe plus qu’à ce qui est en-dehors de la Vie. L’Ennui, je le subis depuis l’enfance, je le subis maintenant & ne vois pas que ça va changer. Il est entendu que j’ai des projets, mais qui sont voués à demeurer désespérément virtuels,
– comme je suis virtuel.

Mystique nocturne ( Nuit du 03 au 04.08.13 )

L’extase commence par des projets. Mais ÇA ne fait que débuter. Je sais que, dans une heure, je serai renversé par la Joie, – ravi. Un certain sentiment de plénitude succède aux projets les plus fous, les plus effilochés.

– La Musique me gagne. Je perds les frontières de mon moi.

Mais ÇA monte encore. Je ne sais pas comment il sera possible que ça s’achève. Le cœur s’emballe. Tout phénomène, désormais
– est vertical. Je m’abolis, comme pris de quelque froid.

Je connais l’Extase, mais, pour une fois, j’ignore jusqu’où cela va me conduire. Psychisme ascensionnel? Pulsions mystiques? Non : Dieu est un homme comme les autres. Aussi est-ce que, à l’instar de ce que je fais quant il s’agit des autres, je m’en désolidarise…
Débuts de perceptions péri-oculaire, péri-conscientes. Cigarette.

MENTAL FLOSS

Atroce hymne maladive, atroce broyage, peigne mental; mais au sens où la Pensée n’est qu’une éventualité, la fulgurance d’un ordre possible & gluant
– contre les limites duquel je m’inscris, contre lequel j’écris ces lignes, aussi morbide que cela paraisse.

Je vous expliquerai cet Infini, cette brusque rupture, & ce probablement dans le domaine purement & simplement cérébral,
d’une digue.
Oui : ce qui, jusqu’ici, filtrait ma perception de la Réalité, désormais cède. & me voici dans l’Infini ignée, dans la poursuite à l’Infini du Processus.
& je ne connais que trop ce process pour savoir que, bientôt, je ne pourrai plus réfléchir, que cette idiotie, phénomène ondoyant s’il en fût, va me troubler, me trembler, me vibrer.

Je n’en suis pourtant pas encore là, mais mon corps commence de s’illimiter, & mon Esprit, perdu dans ce Gouffre, le Gouffre d’en-haut… – Qui crée ce vertige & cette perte. Le désert atroce, solitude démoniaque & insomniaque. J’entre dans le jeu vidéo, dans la machine à laver insoluble de cette Nuit Infernale.
Effectivement… Toute Pensée m’abandonne au seuil de quelque furieux paroxysme.

Je viens de décrire, bien ou mal, peu m’importe, un état de possession que l’on qualifiera de chamanique ou de mystique. Il ne m’appartiens pas de le définir, non plus que de préciser quoi que ce soit quant à mes rapports au Divin, encore moins à la Religion.

Toujours est-il que l’ascèse de l’Emprise conduit au seuil de la Révélation, à ce lieu terrible & risqué où l’individualité se brise, intérieurement & extérieurement, sous les assaults de la Joie.

– je vous décris ce rapt, pourtant, dans mon état normal.

Qui suis-je pour critiquer?
Qui es-tu pour critiquer?

Suis-moi si tu le veux. Mais sache que le chemin est sans retour.
Suis-moi seulement si tu le peux…

***